Peu documenté, le comportement du bois en cas d’accidents conduit les constructeurs automobiles à limiter son utilisation à des fins de décoration. Mais au fil des années, les essais ont permis de mesurer les qualités du bois, notamment celles des feuillus, qui pourrait être intégré dans d’autres domaines.
« Les chênes tu éviteras, les hêtres tu chercheras. » Ce proverbe prévalant en cas d’orage prend désormais une signification élargie à la voiture. En effet, les hêtres sont aujourd’hui très recherchés pour la solidité de leur bois et leur potentielle implication dans la construction automobile. Différents facteurs entrent en jeu, d’une part, en termes de mobilité, la demande des pays émergents s’accentue; de l’autre, les constructeurs sont à la recherche de matériaux légers susceptibles de réduire le poids exponentiel des voitures.
Et enfin, l’utilisation de produits renouvelables est une préoccupation généralisée. Parmi eux, le bon vieux bois ne manque pas d’arguments, il est stable, résistant, facile à recycler, relativement léger et écologique. Si l’on prend en compte l’ensemble du cycle de vie d’un produit, autrement dit l’énergie grise, à quantité égale une tonne de bois se révèle 70 fois moins énergivore que l’aluminium et 20 fois moins que l’acier. Plutôt intéressant.
Reste que si lors de simulations d’accidents le comportement de matériaux homogènes, tels l’acier ou le plastique, est facile à mesurer, celui du bois est plus complexe à étudier et les données font encore défaut actuellement. Corollaire: en l’absence de relevés fiables, impossible d’introduire de nouvelles matières dans la structure d’une voiture et le bois reste utilisé à des fins décoratives.
Pourtant, une large étude, menée depuis quelques années par le département des ressources naturelles de l’Université de Vienne (BOKU) conjointement avec l’Université technique de Graz, le centre de compétences « véhicules virtuels » et différents partenaires montre que les vertus du bois sont mesurables. Mieux, le résultat probant de ces recherches a débouché, en 2016, sur un projet quadriennal dénommé Wood C.A.R. et subventionné par l’Etat autrichien. En association avec des entreprises comme Man, Weizer ou Mattro, les scientifiques étudient essentiellement le comportement de structures en bois lors d’accidents. Les chercheurs travaillent avec des pièces en contreplaqué combinées avec des matériaux composites, du plastique ou du métal.
« Facilement transformables, les feuillus sont au coeur du dossier », explique Ulrich Müller, collaborateur du BOKU à Vienne et directeur scientifique de Wood C.A.R. « Nous nous concentrons sur le hêtre et le bouleau pour leurs propriétés technologiques et mécaniques ainsi que leur facilité de traitement. » Autre élément d’importance, l’évolution et la stabilité du parc forestier d’Europe centrale conduit à une augmentation de la proportion de feuillus. « En Allemagne, nous constatons aujourd’hui déjà que les hêtres sont beaucoup plus nombreux qu’il y a 20 ans. Par conséquent, de nombreux chercheurs s’intéressent à ces nouvelles ressources. »
En Finlande, un autre projet retient l’attention. Les chercheurs de l’Université Metropolia d’Helsinki, en collaboration avec le fabricant de papier et de cellulose UPM, développent un concept-car dénommé Biofore. Le châssis de cette berline quatre places est en carbone, par contre les ailes, l’intérieur des portes et du toit, comme la garniture de la planche de bord sont issus d’un mélange de plastique et de cellulose. Et les panneaux extérieurs des portières sont en fibres de cellulose, principal constituant des cellules végétales. « Seuls les éléments qui pourraient poser problème en cas de collision, l’essieu avant, les zones situées derrière le parechocs frontal, les fixations du moteur et des suspensions, sont en acier », explique Pekka Hautala, directeur de la faculté d’ingénierie automobile et mécanique de l’université. Depuis 2014, les Finlandais présentent leur voiture en bois dans les salons automobiles et procèdent à des tests sur des tronçons fermés à la circulation.
Tirons un rapide bilan des opérations. « Lors des crash-tests nous avons constaté que la déformation de la structure carbone-cellulose était 80% moins importante que celle de l’acier », précise Hautala. De plus, durant les quatre dernières années, le matériel n’a subi aucune altération.
Conclusion: « A l’intérieur d’une voiture l’ensemble des pièces en plastique pourrait être remplacé par des revêtements composites constitués de plastique-cellulose qui sont aussi plus résistants au feu, donc plus sûrs », affirme Pekka Hautala. Sans oublier que le concept-car Biofore roule avec un biodiesel issu de l’huile de pins récupérée lors de la fabrication du papier. « Comparé au diesel traditionnel, ce carburant permet de diminuer de moitié les émissions de CO2 par kilomètre et serait parfaitement utilisable avec les moteurs actuels », relève Pekka Hautala. Les autorités finlandaises examinent en septembre l’homologation routière du conceptcar. Et si la décision est positive, le véhicule en bois sera testé en conditions réelles.
Texte: Juliane Lutz
Photos: LLD
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